Idiopathie de Sam Byers {RL2013}

 Premier Roman
Rentrée Littéraire 2013

Idiopathie

de Sam Byers

traduit de l’anglais
par Nicolas Richard

Seuil, août 2013
9782021099867, 21,50€

 

Katherine n’aime personne. Même pas elle même. Elle a tiré un trait sur le bonheur. Daniel lui semble heureux, avec sa jolie compagne. Pourtant il a bien du mal à y croire. Quand Nathan revient après plus d’un an d’absence, Katherine et Daniel, ses anciens amis, sont bien obligés de se parler de nouveau.
Une comédie anglaise sur fond d’épidémie bovine étrange. Si même les vaches se mettent à déprimer, cela en dit long sur la société.

Ces personnages et notamment Katherine sont enfermés dans un narcissisme qui les pousse à ne croire en personne, à ne supporter personne. Un aperçu de la société nombriliste dans laquelle nous vivons. Les personnages sont finalement détestables aussi pour le lecteur, bien qu’on finisse par plaindre Katherine. Ils s’enferment eux même dans leur malheur et ne cherche pas de portes de sorties. Seul Nathan semble avoir grandi, être prêt à devenir adulte. Le brin d’humour distillé par Sam Byers semble constant pourtant, peut être est-ce le fait de la traduction ou de la différence de culture, on sourit peu dans ce roman, s’enfonçant plutôt dans une noirceur assez prenante qui n’est finalement relevée que par les coups de gueule de Katherine.

L’utilisation de la vache comme symbole de la chute d’une société est particulièrement bien vu étant donné les multiples scandales alimentaires qui rythment les informations. L’idiopathie, cette étrange maladie qui apparaît spontanément ou dont la cause est inconnue, devient ici le signe de la déchéance.

Malheureusement si les idées sont là le roman se traîne en longueur sans grande surprise et le grand final, la réunion des trois amis, arrive un peu trop tard dans l’intrigue pour relever le sentiment général.

Un roman intéressant par certains aspects mais avec un sentiment de déjà-vu et un négativisme trop constant.

Lu en juin dans le cadre de l’opération On vous lit tout !

Un week end en famille – François Marchand {RL2012}

Roman adulte – Rentrée Littéraire 2012

Un week end en famille

de François Marchand

Cherche Midi, 23 août 2012
 978-2-7491-2437-7, 13€ 

Faire la connaissance de ses beaux-parents n’est jamais chose facile. Surtout s’ils habitent en Samouse, région que le jeune marié va apprendre à connaître le temps d’un week-end interminable.
Dès le vendredi soir, il lui est évident que cela se passera mal. Mais jusqu’à quel point ? Et l’impulsivité dont il fera preuve est-elle due à son état psychologique déjà bien dégradé ou à la rencontre de plein fouet avec cette diabolique région ?
Son objectif de départ – limiter les dégâts – finira par faire place à une exaltation mystique qui culminera le dimanche, jour du Seigneur.

Un roman désopilant, un jeu de massacre permanent où tous les mauvais sentiments sont mis à l’honneur.

 Quel étrange roman que celui ci! Très court mais complètement déjanté! 

Notre narrateur nous raconte son week end en famille, dans la belle famille bien sûr, et comment tout a mal tourné. Dès le début il faut bien avouer qu’il n’est pas enchanté d’être là, mais la suite du week end est une véritable descente en enfer difficilement imaginable ! Le pire c’est qu’on se laisse prendre dans l’histoire nous aussi, on découvre avec lui cette famille, on sourit à certaines situations de la vie quotidienne dont l’auteur se moque (j’ai adoré le passage sur Ikea!), et on se retrouve au coeur de l’horreur!

Si la critique de la société sous jacente à l’ensemble du livre m’a d’abord paru convainquante, j’avoue que je me suis lassée, je l’ai trouvé trop forte, trop méchante, sans grande réalité finalement. Exacerber les défauts est intéressant mais il faut savoir s’arrêter à temps et je trouve que François Marchand est souvent allé trop loin dans ce récit. Je ne suis pas fan de l’humour noir en général il faut bien l’avouer, et c’est là la spécialité de l’auteur… J’ai pourtant trouvé certains passages terriblement savoureux, avant de me lasser avec l’arrivée du dimanche et d’un mysticisme trop incongru.

Un roman délirant aussi dans le sens où le narrateur est sous médicament, à tel point qu’il devient difficile de différencier ses projections de la réalité. Le lecteur, simple spectateur se retrouve impliqué dans ce délire à tel point qu’il est un peu comme un complice, celui de cet homme un peu fou qui nous embarque dans un week end épique !

+ L’avis de George, L’avis de Géraldine

Au pays des kangourous de Gilles Paris

Au pays des kangourous

de Gilles Paris

roman adulte

Don Quichotte, janvier 2012
9782359490589, 18€

Extrait : « Ce matin, j’ai trouvé papa dans le lave-vaisselle.
En entrant dans la cuisine, j’ai vu le panier en plastique sur le sol, avec le reste de la vaisselle d’hier soir. J’ai ouvert le lave-vaisselle, papa était dedans. Il m’a regardé comme le chien de la voisine du dessous quand il fait pipi dans les escaliers. Il était tout replié sur lui-même. Et je ne sais pas comment il a pu rentrer dedans : il est grand mon papa. »
Simon, neuf ans, vit avec son père Paul et sa mère Carole dans un vaste appartement parisien.

– Présentation censurée, elle en dit trop à mon goût, j’aime les surprises, pas vous ? –

Sous ce titre un peu enfantin se cache un roman difficile et délicat.

Simon a neuf ans et peur des monstres dans le placard lorsqu’il découvre son père caché dans le lave-vaisselle. Il n’apelle pas sa mère Carole, qui travaille au pays des kangourous mais Lola, sa grand mère. Cette femme encore jeune et délurée va prendre en charge Simon pendant que son père part “se reposer” à l’hopital.

Cette histoire assez dérangeante est pourtant bien ancrée dans la réalité. Elle nous est racontée par Simon, avec son regard d’enfant et on sent qu’il peine, qu’il n’arrive pas à dire l’absence de la mère, devenue une habitude, l’incapacité du père à être là, ni les secrets de tout ces adultes qui l’entourent. Simon garde pourtant une certaine joie de vivre et cache ses peines. Il fait des moindres moment de joie une force et son caractère est étonnant. Pourtant on ressent ses faiblesses dans les rêves qu’il fait les yeux fermés mais dont il ne parle pas et dans sa rencontre avec Lily. Enfant fantomatique des couloirs d’hopitaux, Lily avec ses mots d’enfants saura expliquer la dépression et permettre peu à peu à la vérité d’éclore.

J’ai apprécié ce roman, son thème délicat vu par les yeux d’une enfant mais j’ai eu un peu de mal à commencer ma lecture. Des phrases courtes, sans doute pour coller au personnage de Simon mais des mots et d’idées d’adultes m’ont tout d’abord freiné, moi et mes habitudes de la littérature jeunesse. Mais Simon est un personnage vraiment intéressant et j’ai fini par m’attacher. J’ai eu du mal à lui donner un âge tant on dirait à certaines pages qu’il a 6 ans (les monstres ou le père noel par exemple) et à d’autres 15 ans (notamment quand il parle de sa mère, tant il met de la distance). Ce n’est finalement que quand la situation évolue qu’il retrouve son âge, ses 10 ans, son enfance.

Les autres personnages sont eux aussi intéressants, drôles souvent dans leur attitudes ou manies (ah les amis de Lola…) mais c’est surtout Lily qui m’a plu. Et touchée. Mystérieuse, évanescente…  une telle aide pour Simon et pourtant c’est elle qu’on a envie d’aider. J’étais restée cependant sur mon image fantomatique et la postface ainsi que la présentation du livre m’ont appris à mieux la connaître… étrange non?

Un roman très touchant aux personnages un peu irréels qui nous entraînent dans un monde entre folie et réalité, enfance et maturité.