2- Maxoo – l’union des rêves –

L’union des rêves

            Victor était un chasseur de rêves.

            C’était un métier qui demandait beaucoup d’agilité,
pour bondir de toit en toit, beaucoup de dextérité, pour manier le filet à rêves, beaucoup de courage, pour sortir seul la nuit et beaucoup d’imagination, pour effectuer un tri entre beaux rêves
et rêves anodins, tout en évitant les cauchemars dangereux et les hallucinations inutiles.

            Agilité, dextérité, courage et
imagination.

            Victor était agile, dextre, courageux et avait
toujours fait preuve d’imagination. C’est d’ailleurs cette imagination qui lui avait permis, lorsque ses parents étaient morts, de ne pas se retrouver enfermé à l’orphelinat mais d’être embauché
par monsieur Paul.

            Mystérieux et inquiétant monsieur
Paul.

            Victor ignorait ce qu’il fabriquait avec les rêves
qu’il lui achetait, pas très cher d’ailleurs, mais cela n’avait pas vraiment d’importance pour Victor. La seule chose qui comptait pour lui, c’était de voir les songes se glisser par les
interstices entre les tuiles des toits, se déployer en fines volutes colorées, onduler un instant comme s’ils cherchaient leur route puis filer vers les étoiles. Sauf si Victor se montrait assez
rapide.

            S’il se montrait assez rapide et abattait son filet
avec suffisamment de précision, le rêve finissait dans sa besace.

            Une nuit de printemps, alors qu’il n’avait capturé
qu’un petit rêve bleu et cherchait quelque chose de plus consistant à attraper, Victor aperçut une fille adossée à une cheminée.

            Elle regardait le ciel et ne parut pas surprise
lorsqu’il s’assit à ses côtés.

– Tu t’appelles comment ? demanda Victor.

            Elle se tourna vers Victor, qui découvrit un regard
d’un bleu turquoise hypnotisant, qui montrait une grande confiance en soi, par endroits il était caché par des mèches brunes, qui descendaient sur un visage fin d’une beauté
extraordinaire.

– Morgane. Toi tu es Victor. Tu vends les rêves que tu attrapes à monsieur Paul ! Je suis une Protectrice de rêves, je
t’ai observé pendant toute la semaine. Tu ne sais pas même pas ce que Monsieur Paul fait aux rêves… dit-elle avec une mine désolée, elle rajouta. Viens, je vais te montrer !

 

            Elle se leva et partit en courant sur les toits de
Paris, avec la grâce féline que seuls ceux du monde des rêves possèdent. Victor avait du mal à la suivre, elle était à plus de trois mètres devant lui. Elle s’arrêta sur le toit de l’immeuble qui
faisait face à celui de monsieur Paul. Elle s’allongea au bord pour qu’on ne puisse la voir, Victor l’imita. Elle lui désigna la fenêtre de la chambre de M. Paul et lui fit signe de ne faire
aucun bruit. Il regarda et vit M. Paul ouvrir sa fenêtre et siffler dans une drôle de corne de brume, qui ne fit aucun bruit. M. Paul regardait vers le ciel, il semblait anxieux. Une ombre se
détacha du ciel et descendit vers le sol, elle s’arrêta devant M. Paul. Victor et Morgane voyaient bien que M. Paul avait peur. Il tendit la main, un rêve luttait pour se libérer, mais l’ombre
l’enveloppa et aspira toute son énergie. Après l’avoir tué,  l’ombre partit dans le ciel.

            Victor se tourna vers Morgane et lui
demanda:

– C’était quoi ce truc ?

– Baku, le mangeur de rêves… Avant, M. Paul était un chasseur de rêves, jusqu’au jour où il a été attaqué par des
cauchemars enragés qui l’ont persécuter jusqu’à ce qu’il ait peur de tous ce qui touchait au monde des rêves! Baku  en a profité et lui a proposé un marché, M. Paul lui donne des rêves en
échange de quoi il éloigne les cauchemars de M. Paul… Pour l’équilibre du monde des rêves, qui ne dépend pas de M. Paul, je te demande d’arrêter de vendre des rêves à M. Paul.

            Victor regarda le petit rêve bleu qui se trouvait
dans son filet à rêves, et il le libéra. Celui-ci flotta un moment au-dessus des deux jeunes chasseurs, avant d’aller se lover dans les bras de Morgane, qui se mit à le caresser. Victor vit avec
étonnement que le rêve grandissait et devenait de plus en plus lumineux !

– Souffle m’a donné le pouvoir de renforcer et faire grandir les rêves, rien qu’en le voulant, expliqua Morgane devant
l’air interdit de Victor.

– Souffle ?

– Le rêve que j’accueille dans mon corps. Certains rêves choisissent d’avoir des hôtes, d’autres préfèrent la liberté
de s’insinuer dans les pensées de tous les humains pendant leur sommeil.

            Le rêve bleu que Morgane tenait dans sa main avait
maintenant la taille d’un bébé ! Il s’éleva dans les airs et soudainement, il fondit vers Victor qui eu un mouvement de recul, mais le rêve s’insinua en lui.

            Victor sentit un sentiment étrange l’envahir, il
entendit une minuscule voix dans sa tête lui murmurer :

– Bonjour Victor, je suis Union, ton rêve. Je te donne le pouvoir de lier les rêves, de créer ce qui te plaira grâce
aux rêves ! Je t’aiderai à cette tâche du mieux que je pourrais ! Tu peux vaincre Baku, tu es l’un des plus puissants Lieurs qui ais jamais existé ! Souffle m’a fait grandir plus qu’il ne le
voulait, il s’est épuisé, il s’arrêta un peu de parler avant de reprendre. Tu as connu l’amour et la tristesse de le perdre, alors je pense que tu peux comprendre que nous, les rêves, voulons
vivre en liberté, avec l’espoir de vivre en paix pour toujours. Maintenant, j’aimerais que tu rendes la liberté aux rêves que tu as attrapés qui se trouvent toujours dans l’appartement de M.
Paul… »

            Victor se tourna vers Morgane et lui
demanda:

– Tu vas bien ? Il paraît que tu ne te sens pas bien, que tu es fatiguée ?

– Non, c’est Souffle qui est épuisé. Les performances des rêves sont indépendantes de celles des humains, lui
expliqua-t-elle.

– D’accord… Il faut qu’on sauve les rêves qui sont toujours chez M. Paul !

            Elle acquiesça et regarda vers l’immeuble de M.
Paul, d’où on voyait M. Paul qui sortait en mettant son manteau.

– Il va à notre rendez-vous quotidien, il lui faut à peu près un quart d’heure pour y aller. S’il ne me voit pas
arriver, il va attendre cinq minutes et revenir. Donc ça nous fait trente-cinq minutes pour agir ! Allons-y !

            Morgane et Victor descendirent dans la rue. Après
avoir regardé partout si la voie était libre,   ils entrèrent par effraction dans l’appartement de M. Paul. Ils regardèrent dans toutes les pièces jusqu’à ce qu’ils trouvent la pièce où
était emprisonnés les rêves. Ils ouvrirent tous les bocaux où les rêves étaient enfermés. Les rêves s’envolèrent par la fenêtre. Seul deux suivirent Morgane et Victor dehors. Sur le toit,
contents d’eux, ils partirent tranquillement avec les deux rêves, l’un violet aux reflets bleus et l’autre bleu avec des reflets verts, tournoyant autour de leurs têtes. D’un coup, les deux rêves
se réfugièrent sous les manteaux des deux jeunes. Union avertit Victor : « Baku arrive ! Enfuis toi ! » Morgane et lui commencèrent à courir du plus vite qu’ils pouvaient, ils se
retournèrent qu’une seule fois, pour voir un immense nuage noir qui leur foncer dessus. Heureusement, leurs capacités de chasseurs de rêves les laissaient assez loin de cette monstrueuse
créature. Au bout d’un moment, Morgane et Victor, épuisés, s’arrêtèrent derrière des poubelles dans un petite ruelle perpendiculaire à la grande avenue de Paris.

– Il a l’air d’avoir abandonné… murmura Victor, à bout de souffle.

– Ça se voit que tu ne connais pas Baku, il n’abandonne jamais. Pour l’instant, il faut juste qu’on trouve un endroit
où s’abriter, un endroit comme… elle réfléchit et d’un coup murmura : La Maison des rêves ! Baku ne peut pas aller là-bas ! Viens ! Je connais une Voyageuse qui peut nous y envoyer ! Elle a le
pouvoir de nous faire passer dans la Maison des rêves ! s’exclama la jeune fille.

            Morgane et Victor, avec les deux rêves toujours dans
leurs vestes, parcoururent Paris, jusque dans la banlieue, où Morgane s’arrêta devant un immeuble qui n’avait rien de particulier en lui-même, mais Morgane lui dit en souriant, que ce n’était pas
l’immeuble qu’il fallait trouver particulier, mais plutôt une de ses locataires. Ils montèrent jusqu’au quatrième étage, Morgane s’arrêta devant la porte de l’appartement numéro vingt-deux, elle
y sonna. Ils entendirent des bruits de clefs et de serrures, une vieille dame vint leur ouvrir et les observa de la tête aux pieds, et quand elle reconnue Morgane, elle s’écria:

– Morgane ! Ça fait si longtemps ! Comment ça va ? Venez, entrez !

            Elle s’effaça de la porte pour les laisser passer.
Quand ils furent rentrés, elle referma la porte derrière eux à double tour, ou plutôt à quintuple tour, il y avait cinq serrures sur la porte ! Voyant la perplexité de son ami, Morgane lui
souffla, pour pas que la dame n’entende :

– Elle a toujours peur que quelqu’un la cambriole, elle a acheté des alarmes pour chaque pièce, mais je la comprends,
quand on possède une porte de Voyageuse, il faut savoir la garder… Mais c’est surtout pour se rassurer, car Baku peut largement passer… Mais vaut mieux que cela n’arrive pas.

La dame revint avec un plateau rempli de petits gâteaux secs et de trois tasses de thés, Morgane se tourna vers elle et
lui dit:

– Alors, madame Barbara comment allez vous, je vous présente Victor, un Lieur.

Mme Barbara se tourna vers Victor et lui sourit :

– Je vais bien ma petite, mais vous, vous avez l’air épuisé ! Prenez donc un petit remontant ! dit-elle en leur tendant
leurs tasses remplies de thé brûlant.

– Barbara… dit Morgane en refusant la tasse. Nous n’avons pas le temps de prendre un remontant, il faut que vous nous
envoyez dans la Maison des rêves. Baku nous poursuit, nous avons libéré des rêves qui lui servait de nourriture… Comme pour affirmer ce qu’elle disait, les deux rêves sortirent des vestes des
deux jeunes. Ils allèrent vers Barbara et lui tournoyèrent autour de la tête. Elle était émerveillée par la danse de ces deux tâches de couleur qui volaient dans les airs.

– Je comprends… Venez, et surtout prenez soin de ces deux petites beautés, elles s’appellent Liberté et Espoir, les
deux mots maître dans la Maison des rêves !

            Elle traversa l’appartement, jusqu’à une pièce, où
se trouvait uniquement une immense porte ronde, sculptée qui flottait en l’air, elle était faite en un très vieux bois, très sombre. Mme Barbara s’avança vers cet étrange édifice et tendit la
main. Un bruit de porte se fit entendre dans toute la pièce et tout s’illumina d’un coup. À travers la porte on distinguait un monde, fait de lumière. Morgane, Victor, Liberté et Espoir la
traversèrent, unis.

            Ils arrivèrent dans un endroit illuminé par des
dizaines ou même des centaines de rêves qui volaient autour de Victor et ses compagnons      . Un homme vint vers eux, il se révéla être le tuteur de Victor dans la
Maison des rêves. Il leur fit faire le tour de cette immense bâtisse, à Victor du moins, car Morgane la connaissait déjà. C’était un Lieur lui aussi. Pendant deux semaines, il lui apprit à
contrôler son pouvoir. Liberté et Espoir, reconnaissants envers Morgane et Victor de les avoir sauvés, restèrent tout le temps avec eux. Un lien fort se formait entre Morgane et
Victor. Au cours de ces deux semaines, ils s’étaient rapprochés, l’amitié avait petit à petit, fait place à l’amour. Chacun de son côté  ils hésitaient à le dire à l’autre, ne sachant pas ce
que ressentait l’autre. Un jour, Liberté et Espoir demandèrent à Morgane de les faire grandir. Ensuite, ils demandèrent à Victor de lier ensemble pour former quelque chose qui pouvait servir,
Morgane eu l’idée d’une arme, Victor accepta de les lier en une épée. Victor avait vu le violet et le bleu se mélanger pour former une épée magnifique, il lui donna le nom de Paix.

            Quelques jours plus tard, un rêve arriva avec une
horrible nouvelle : Baku avait capturé le rêve de Mme Barbara, il pouvait arriver d’un moment à un autre ! Victor et quelques Protecteurs qui ne s’étaient pas enfuis à cette nouvelle, restèrent
devant la porte de Voyage à attendre, Victor, pour attendre, créa une armure et un bouclier pour tous ceux qui étaient restés. Les Lieurs se tenaient près pour créer une barrière autour de la
porte pour que Baku ne puisse entrer dans la Maison de rêves. Après deux heures d’attente interminables, la porte s’ouvrit. Les Protecteurs se mirent à faire grandir les rêves  pendant
Victor et les autres Lieurs présents les lient en une barrière transparente, puissante et 
indestructible. Baku fut arrêté par la barrière. D’abord surpris il hésita, mais ensuite il
commença à rire, ce qui inquiéta les Lieurs. Il s’étendit vers la barrière, qu’il tâtonna et qu’il testa de ses doigts de néant. À la grande surprise des fondateurs de la barrière, elle se fendit
et disparut ! Victor s’exclama :

– Baku aspire les rêves de la barrière ! Fuiez !

            Tout le monde se mit à courir dans tout les sens,
Baku faisait beaucoup de victimes, plus il se nourrissait, plus il grandissait ! Tous les Protecteurs étaient tombés, sauf Morgane qui était coincée dans un coin de la salle de la Porte. Elle
cria quand Baku aspira Souffle. Victor se retourna et la vit tomber. Il commença à pleurer, et se dit qu’elle ne pouvait pas mourir. Il entra dans une haine sans limite pour Baku. Il appela tous
les rêves à venir se lier à son épée. Union lui souffla:« On n’aura pas assez de pouvoir pour tous les lier »Victor ignora cette remarque. Tous les rêves fonçaient vers l’épée  et
se liaient à elle, elle brillait de plus en plus. Au bout d’un moment, plus aucun rêve ne vint.

            Baku s’était arrêté pour regarder le manège de
Victor, il était attentif et prudent, car il n’avait jamais vu un aussi puissant Lieur de toute son existence ! Baku vit une haine animée par l’amour dans le regard de ce Lieur, qui paraissait si
jeune, mais qui avait une assurance et une puissance extraordinaires ! Tout à coup, le Lieur se mit à courir vers lui, surpris, il eu un moment de recul, mais ensuite il se rappela que c’était
lui le plus fort, et il fonça vers ce petit orgueilleux qui croyait pouvoir le battre !

            Victor mit tout l’amour qu’il possédait dans l’épée
qu’il avait à la main. Quand il arriva sur Baku, il le traversa en donnant de grands coups d’épée, qui lacérèrent ce nuage noir de part en part. De la lumière s’échappait de chaque estafilade que
Victor faisait ! Des rêves s’en échappaient par flots de dizaines ! Ce dernier n’en croyait pas ses yeux, ce petit Lieur l’avait massacré avec une petite épée de rien du tout ! Il avait été
vaincu…

            Baku explosa, libérant ainsi des milliers de rêves
qu’il avait mangé au cours de ces précédents millénaires. Chaque rêve retrouva son hôte. Victor, après avoir délié tous les rêves de son épée qui elle aussi disparut, Union lui murmura dans sa
tête : « Je n’ai pas assez de force pour survivre face à l’amour. Même l’être le plus pur au monde doit se soumettre à l’amour ! Continues sans moi, je suis fier que tu ais banni
Baku, et que j’en ai été un des acteurs de cet acte historique… » Puis ce fut le silence complet dans son esprit. Union avait disparu de lui… Il pleura en silence cette perte énorme. Il
se releva et vit Morgane se relever et il courut vers elle, l’enlaça et l’embrassa. Aucune honte ne venait assombrir ce moment unique que Victor vivait en ce moment, jamais il n’avait été aussi
sûr de lui et aussi fier. Morgane lui rendait son baiser, le jeune homme était aux anges.

            La Maison des rêves mit quelques jours avant de
redevenir comme avant, Morgane demanda à Souffle de trouver un nouvel hôte, elle lui expliqua qu’elle voulait vivre tranquillement avec Victor dans le monde normal, et qu’il pouvait venir la voir
s’il le voulait. Mme Barbara avait retrouvé son rêve. On avait retrouvé M. Paul, mort, quand il avait vu les cauchemars revenir vers lui, il s’était suicidé, Baku n’avait pas apprécié qu’il
laisse s’enfuir les rêves.

            Souffle avait renoncé à avoir un nouvel hôte, il
venait chez Victor et Morgane pour leur donner des nouvelles de la Maison de rêves, qui maintenant était en paix. Victor et Morgane voulaient juste être normaux et vivre normalement comme des…
chasseurs de rêves. L’amour les liait plus que ce qu’un Lieur, même plus puissant que Victor, aurait pu faire…

 

Incipit du texte à partir de l’incipit de Pierre Bottero pour le concours Etonnants voyageurs


Max0o

 


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A propos Herisson

Passionnée de littérature jeunesse, dévoreuse de livres, jeune maman !
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8 Commentaires

  1. Original et très poétique, j’aime beaucoup ! (^-^) on sent bien l’inspiration Pierre Bottero ! ;)

  2. Très joli texte, plein de douceurs et de tendresse. J’aime beaucoup cette idée que chaque être a un rêve en lui!… Texte qui a plus que de la matière pour être développé d’ailleurs… Bravo Maxxoo… Continues!

  3. Peut-être il y aura une suite =) Après pour approfondir je verrais ^^ =)

  4. Allez je revote ! (^-^)

  5. J’adore vraiment et j’aimerais beaucoup lire une suite Maxo0 ! (^-^)

  6. Je vote pour Maxoo ! J’adore sa nouvelle ! Quelle imagination :)

  7. Je n’ai jamais lu de Bottero mais je suis impressionnée que tu puisses inventer un te monde. Dommage, dans tout ça tu as de la matière pour faire un texte beaucoup plus long, ça va trop vite!

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