Seuls en exil – BD ♥

seulsRoman graphique
A partir de 14/15 ans

SEULS EN EXIL

Menor, Ramon & Kalonji

Éditions Helvetiq (2022)

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Seuls en exil présente trois récits de vie. Trois parcours différents qui se sont rejoints dans un même endroit, à Genève, dans un foyer pour RMNA. RMNA pour Réfugiés Mineurs Non Accompagnés.

On écoute tout d’abord l’histoire de Kocholo. A 6 ans, il quitte l’Afghanistan avec sa tante pour aller vivre en Iran. A 8 ans (?!), il commence à travailler dans l’usine textile qui emploie sa tante. Et à 11 ans il y travaille à temps plein. Sa tante décède lorsqu’il a 15 ans. Il décide alors de partir pour le Canada, mais sa route s’arrêtera à Genève.

La 2ème histoire, c’est celle d’un jeune érythréen de 15 ans, Sebemalet. On ne sait pas vraiment pourquoi il quitte un jour son pays. Il parle juste de “pays hostile”. Un parcours long, difficile et très dangereux va l’amener aussi à Genève. Il y est depuis 5 ans.

Le 3ème récit est celui d’Ehsan. Né en Iran, d’origine afghane, issu d’une ethnie persécutée par les talibans et battu par son père, il a essayé de se suicider à plusieurs reprises. Il a pris le chemin de l’exil pour sauver sa peau.

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KOCHOLO

En cette période de fêtes, je me doute que beaucoup de gens n’auront pas envie de lire ce genre de récit. Pourtant il serait dommage de passer à côté de ce très beau roman graphique.

Chaque histoire est “adaptée” et mise en images par un auteur/illustrateur différent. La 1ère, Kocholo, est racontée de façon très simple et j’ai bien aimé les illustrations. Elles sont un peu “naïves” avec des traits de contour  “gras” et des couleurs douces.

SEBEMALET

Pour Sebemalet, j’ai également beaucoup aimé les illustrations façon “dessin animé”. Elles sont assez rondes, tout en nuances de gris avec parfois un peu de couleur. Des illustrations très douces pour une histoire très triste.

https://helvetiq.com/media/catalog/product/s/e/seulsenexil_detail_fr_web_585x674_02.webp

EHSAN

Pour le 3ème récit, celui d’Ehsan, ce sont des illustrations à l’aquarelle (me semble t-il) Très peu de couleur, du bleu et du beige/brun essentiellement.

Ce qui est triste, c’est qu’après avoir vécu des moments plus que difficiles, on ne leur donne pas une chance de se former, d’apprendre à parler la langue du pays dans lequel ils sont… Et qu’on ne me dise pas qu’il n’y a pas d’argent. Quand il s’agit de renflouer des banques, on en trouve toujours !

J’avoue que je ne sais pas comment on traite ces migrants mineurs en France. Mais je suis choquée qu’un pays comme la Suisse, européen et riche ne s’occupe pas mieux des enfants/ados qui arrivent sur son sol après avoir vécu des horreurs…

Ce que j’aime dans ce style de bd, c’est qu’on ne parle plus “de migrants” en général. Mais bel et bien de personnes. Kocholo, Sebemalet et Ehsan rendent “réelles” ces histoires de migration qu’on voit à la tv…

En bref : des histoires de vie difficiles que les illustrations aux couleurs douces rendent plus “faciles” à lire…
Une très belle BD que je vous recommande ! ♥
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Yrgane Ramon (1988-) est une illustratrice et autrice lyonnaise. Elle a fait ses débuts dans la BD avec la série Cath et son chat. Elle vit à Lyon et travaille pour un studio d’animation.

JP Kalonji (1973-) est un peintre, illustrateur et auteur de BD genevois. Il est notamment l’auteur de 365 Samurais and a few bowls of rice (Éditions Dark Horse).

Fabian Menor (1997-) est un illustrateur, graphiste et auteur de BD genevois. Il est l’auteur de Derborence (présenté ici) paru chez Helvetiq, et de Elise paru chez La Joie de lire.

Pour en savoir plus, c’est sur le site de l’éditeur

Interview d’un des trois auteurs, JP Kalonji

Cet album participe à la BD de la semaine chez Noukette

Trois histoires de réfugiés

Trois

Reportage en BD
Ado / Adulte

Trois histoires de réfugiés

M. Ozkul – R. Phildius – J. De Clerck

Couverture illustrée par Joe Sacco

Coll. Somnambule

La Joie de Lire (2022)

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Cette bande dessinée, comme son nom l’indique, nous parle de 3 personnes, qui ont dû quitter leur pays pour différentes raisons. Lela est Géorgienne. Elle est venue en Suisse pour faire soigner son mari qui souffre de graves problèmes neurologiques. Mais si la Suisse veut bien soigner son mari, Lela et son fils sont priés de retourner d’où ils viennent…

Sri est Tamoul. Il avait 13 ans lorsque la guerre a éclaté chez lui, au Sri Lanka. Plus tard, pour avoir traduit des documents, il se retrouve en prison pendant 3 ans. Il fonde une famille, a deux enfants, mais la reprise des troubles entre Cingalais et Tamouls l’oblige à quitter le pays. Et il va enchaîner les petits boulots pendant des années dans différents pays, sans gagner assez pour subvenir aux besoins de sa famille. Il décide donc de partir aux USA. On est en septembre 2001…

Ali est Afghan, il a 20 ans. Là où il vit, il n’y a pas d’université. S’il veut étudier, il faut aller à Kaboul. Mais pour y aller, il faut traverser des régions contrôlées par des terroristes. A Kaboul, chaque jour, il y a des morts. Ali a peur, il veut partir. Commence alors un long périple qui va passer par le Pakistan, l’Iran, la Turquie puis la Bulgarie…

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Ce n’est pas la première fois que je lis des témoignages de réfugiés. Mais à chaque fois, je suis franchement admirative devant le courage, l’énergie et la patience qu’il faut à toutes ces personnes pour atteindre leur but. Sans compter les privations, les conditions de vie totalement dégradées, la solitude parfois aussi…

Des gens qui, finalement, ne demandent qu’à vivre en paix et à manger à leur faim. Ce que tout le monde souhaite non ?

Ces trois témoignages ont été recueillis par des étudiants de l’ESBDI (l’école supérieure de bande dessinée et d’illustration) fraîchement diplomés et ce roman graphique est leur premier ouvrage publié.

Côté illustration, c’est en noir et blanc. J’ai bien aimé le dessin de la 1ère histoire (Lela) mais j’ai trouvé que ça manquait un peu de décor (d’arrière plan). Le 2ème témoignage est illustré au crayon à papier. Même si le rendu est assez sympathique, j’ai trouvé qu’il y avait trop de hachures et que le dessin était trop statique. Les dessins du 3ème témoignage sont très noirs !

Sur le site de l’éditeur, La joie de lire, vous pourrez voir plusieurs planches.

Mais si le dessin aide bien sûr à faire passer le message, l’important pour moi, ce sont les histoires vécues par ces personnes. Lire ce genre de témoignages aide à mieux comprendre pourquoi tant de gens fuient leurs pays…

A lire et à faire lire
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D’autres bandes dessinées qui parlent d’immigration : L’Odyssée d’Hakim, Les deux vies de Pénélope

Cette semaine, nous nous retrouvons chez Moka, Au milieu des livres

L’Odyssée d’ Hakim – De la Syrie à la Turquie

HakimDe pépiniériste à migrant
Roman graphique

L’ODYSSÉE D’HAKIM

Fabien Toulmé

Delcourt /Coll. Encrages

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T1 : De la Syrie à la Turquie (2018)
T2 : De la Turquie à la Grèce (2019)
Le 3ème et dernier tome “De la Macédoine à la France” est paru en juin 2020

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En 2016, Fabien Toulmé, s’interroge sur notre “froideur” face aux noyades de migrants essayant de traverser la Méditerranée (3500 morts en 2015 !) alors que l’on réagit beaucoup plus quand un avion s’écrase. Il se dit que pour avoir de l’empathie pour les gens, pour ressentir de la compassion, il faut les rencontrer, connaître leur histoire. Que ce ne soit pas que des chiffres en fin de journal TV. Il a donc rencontré Hakim, un syrien, et lui a demandé comment et pourquoi il était arrivé là, en France.

Après un rapide état des lieux de la situation en Syrie, nous suivons Hakim dans un long retour en arrière…

En fait, Hakim n’a jamais particulièrement souhaité venir en France.

En 2011, il avait 25 ans, était chef d’entreprise et avait une pépinière dans laquelle il adorait travailler. Il gagnait bien sa vie, avait une voiture neuve et venait de s’acheter un appartement. Mais il n’habitera pas longtemps dedans. Des jeunes voulant plus de liberté (et on les comprend !) se mirent à manifester dans les rues. Et parce que l’on avait trouvé un masque (utilisé pour pulvériser les pesticides !) dans sa voiture, Hakim va être arrêté, interrogé et torturé…

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A cause de son sujet, j’ai longtemps hésité avant d’ouvrir ce roman graphique.

Mais les critiques étaient élogieuses et j’avais vraiment beaucoup aimé la première BD de cet auteur.

Alors je me suis plongée dedans ! Et j’ai bien fait. Ce n’est pas une histoire drôle, mais on sourit à de nombreux moments. Fabien Toulmé a un don d’empathie certain et aussi le don de raconter les histoires. Hakim est un jeune homme extrêmement sympathique. Et petit à petit, au fil des pages, on comprend comment on “devient migrant”…

Ce n’est vraiment pas un choix dans le cas d’Hakim, c’est le moins qu’on puisse dire ! Après tout ce qu’ils ont traversé, j’espère pour lui et sa famille qu’ils vont bien maintenant (et j’aimerai qu’il en soit de même pour toutes les personnes qui traversent de telles situations d’ailleurs… Oui, je sais, je suis un bisounours).Hakim

C’est une histoire passionnante ! (même si cette situation est bien évidemment dramatique) et dans laquelle on apprend plein de choses.

J’ai vraiment hâte de lire le tome 3 !

Ajout d’octobre 2020 : J’ai lu le 3ème tome et c’est toujours aussi bien ! Instructif, humain, poignant…

Une BD qui devrait être présente dans tous les CDI de lycées et dans toutes les bibliothèques.

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De cet auteur, nous vous avons déjà présenté le très beau : Ce n’est pas toi que j’attendais

Son blog

Petite bio sur le site de l’éditeur

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C’est bientôt le retour de la BD de la semaine !