Petites scènes capitales – Sylvie Germain

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rentrée littéraire 2013

avis de lecteurs

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Rentrée littéraire 2013
roman adulte

Petites scènes capitales

de Sylvie Germain

Albin Michel, 2013

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Sylvie Germain nous livre dans ce roman une suite de petites scènes de la vie de Liliane. Des scènes capitales, celles qui rythment sa vie. Peu importe les entre-deux, l’auteur se concentre sur ces tranches de vie qui sculptent l’héroïne. Moments cruciaux rarement heureux. Les morts s’enchaînent.

Une vie de rebondissements négatifs en quelque sorte que l’on a du mal à croire tant ils sont accumulés, accolés les uns aux autres. Une vie pourtant et le bonheur d’être en vie.

D’une écriture recherchée Sylvie Germain nous dresse le portrait d’une génération d’après guerre où mai 68 laisse une emprunte libertaire et des slogans révolutionnaires.

A trop passer sur les détails pour se concentrer sur l’essentiel on perd un peu de l’essence du personnage. Pourtant l’auteur n’est pas exsangue de réflexion. L’ensemble du récit est indirect, pas de dialogues, tout se passe à posteriori et l’emploi de la troisième personne nous rend extérieur au récit. Spectateur d’une histoire qui traverse les années.

Un roman magnifiquement écrit qui nous conte la vie d’une héroïne singulière mais finalement peu attachante. Une ode à la vie et à l’amour qui passe par la mort et nous invite à découvrir l’histoire d’une génération.

Les fuyants – Arnaud Dudek

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 Toute la rentrée littéraire 2013, 
avis de lecteurs 

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Roman adulte
Rentrée littéraire 2013

Les fuyants

 Arnaud Dudek

Alma éditeur, août 2013
127 pages

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Quatre hommes, reliés par des liens familiaux, dont on découvre peu à peu l’histoire. Des souvenirs, des journaux, des bouts de vie, réels, imaginés, reconstitués.
Le grand père, qui a quitté un jour sa famille sans jamais revenir. Le père qui s’est suicidé. Le fils, hacker de génie qui ne digère pas la mort de son père et enfin l’oncle, ancien sportif. Quatre hommes qui fuient la vie, qui ne savent pas reconnaître le bonheur.

La difficulté des relations, notamment avec les femmes, rend nos personnages lâches. Quand ils ont peur de faire face ils préfèrent fuir, quitte à tout perdre.

Arnaud Dudek nous livre un roman où le malheur suinte entre les mots mais tout en donnant une légèreté générale grâce à son écriture et à sa fin qu’on peut espérer optimiste.

Les personnages ont tous leurs failles et on ne peine pas à les comprendre même si leur choix radicaux influent sur le destin d’une famille entière.  La narration se fait au plus proche des personnages et bien que ce roman soit court on s’attache à eux. A Joseph Hintel notamment, ce grand père devenu homme à tout faire dans un établissement scolaire, avec son regard aguerri sur la vie. Il fuit pourtant lui aussi la vie mais avec la conscience de l’âge et les regrets.
Joseph, l’adolescent, avec sa naïveté toute relative apporte aussi une touche de fraîcheur et d’espoir.

Une saga familiale condensée en un temps donné avec des souvenirs qui rejaillissent pour nous faire découvrir la lâcheté des hommes. Un roman miroir d’une société décadente, un mélange acide d’humour et de solitude.

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+ Les avis de Clara,

+ Le premier roman de l’auteur : Rester sage

Muette d’Eric Pessan

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 Toute la rentrée littéraire 2013, 
avis de lecteurs 

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Roman adulte
Rentrée littéraire 2013

Muette

d’Eric Pessan

Albin Michel, août 2013
224 pages

Muette n’est pas un adjectif ici, c’est un nom. Celui de la narratrice. Il ne la qualifie pas d’ailleurs, puisque cette grande adolescente n’est pas muette. Elle est plutôt rendue muette.

Muette est en fuite. Elle fugue. Non loin de chez elle, dans la campagne qu’elle connait bien. Elle s’est préparée, semble réfléchie. En la suivant dans sa fuite nous allons découvrir son quotidien, ses obstacles et ses peurs mais surtout nous allons tisser la toile de son passé, apprendre peu à peu à la connaître et à  comprendre cette fugue.

Une histoire assez banale en apparence que celle de cette jeune femme qui ne se sent pas à sa place, mais c’est beaucoup plus que cela. Coincé entre un père présent mais trop occupé et une mère au contraire omniprésente, Muette n’a pas la place d’exister. Et cette mère omniprésente nous la côtoyons un peu aussi, d’une certaine manière….

La grande force de ce roman, ce qui fait son originalité et son attrait, c’est le jeu de la narration. Eric Pessan pour nous faire ressentir le mal être de Muette et l’omniprésence aliénante de la mère insère dans le récit des réflexions maternelles, en italique. Celles que la mère aurait pu faire / aurait fait / a fait à ce moment là, dans cette situation là. Ces phrases en italique coupent réellement le récit, n’hésitant pas à s’interposer au milieu des phrases, des pensées, des situations. Et pourtant ses phrases s’intègrent aussi souvent comme une continuité des pensées de Muette. La résistance de cette jeune fille contre la vie qu’on lui impose se fait sentir dans son désir profond de s’intégrer dans la nature, de disparaître.

Omniprésence parentale donc qui sonne dans l’absence et impose un rythme très particulier au récit, sans pour autant le rendre bancal. En cassant l’apparente monotonie de cette histoire simple, Eric Pessan touche le lecteur, le surprend avec de magnifiques moments d’émotion mais aussi avec une douce tristesse.

« La nuit, déjà, et Muette écoute vibrer les insectes, glissée jusqu’au nez dans son sac de couchage. Elle a chaud mais ne peut se résoudre à se découvrir. Dehors, dans le grand monde, des gens courent à sa recherche, elle n’a plus de doute à ce sujet. Elle y est. Elle a grand ouvert les portes de sa vie. »

Rentrée 2013 +Un coup de coeur pour  Jostein

Challenge 1% Rentrée Littéraire 2013

+ D’autres titres de l’auteur : Incident de personne (Albin Michel, 2010)

 

Le soleil à mes pieds – Delphine Bertholon

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 Toute la rentrée littéraire 2013, 
avis de lecteurs 

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Roman adulte
Rentrée littéraire 2013

Le soleil à mes pieds

 Delphine Bertholon

JC Lattès, août 2013
9782709631082, 16€

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La petite et la grande. Deux soeurs, liées par un terrible passé, tentent de vivre, voir de survivre, au coeur du printemps parisien. Deux soeurs tellement différentes. La grande s’agite, semble ne pas tenir en place et tente de régir la vie de la petite. Petite qui n’ose sortir du cocon de propreté de sa chambre de bonne. Qui n’aime pas le monde, ne parle que si nécessaire et ne supporte pas la moindre saleté.

Pas de prénom pendant longtemps, juste la Petite et la Grande, reliées par cette phrase maternelle : “Quand on a une soeur on est plus jamais seule.” Et en effet la petite n’est jamais seule. La grande vient chez elle tous les jours et la tient sous son emprise. La petite ne sait pas dire non et on la sent sombrer. Un rayon de soleil sur des sandales dorées amorcent pourtant un changement…

Delphine Bertholon sait magnifiquement rendre l’emprise d’un être sur un autre comme elle l’a montré dans Twist. Ici l’effroi est intact tant cette emprise, dans le cadre familial, est difficile à concevoir.

Distillant peut à peu des indices de leur passé, l’auteur maintien un double suspense pour le lecteur : comprendre comment elles ont pu en arriver là et savoir comment la petite pourra apprendre à vivre sa vie.

En nous présentant les personnages par le regard de la petite l’auteur biaise le point de vue et on pourrait presque prendre partie pour la grande parfois. Cette dichotomie des personnages et terriblement portée par l’écriture.

Un roman touchant et prenant à l’écriture souvent incisive et hachée, comme les pensées de la Petite.

Rentrée 2013
+Un coup de coeur pour Stephie et l’avis de Solenn

+ Challenge 1% Rentrée Littéraire 2013

+ D’autres titres de l’auteur : Twist, Grâce, l’Effet Larsen