“On the road with George”
Le générique était fini depuis quelques minutes déjà et les lumières s’étaient rallumées. Pourtant, elle ne bougeait pas, comme pétrifiée au fond de son siège. Le balayeur, d’impatience, entra
dans la salle, l’observa un moment d’un drôle d’air et lui demanda enfin si tout allait bien. « Oui, oui, répondit-elle, ça va ». Elle récupéra son manteau et son sac et sortit du cinéma ;
inspira une grande bouffée d’air frais et se mit en route vers son appartement.
On ne peut pas dire que le film qu’elle venait de voir avait été un chef d’œuvre. C’était même un film plutôt plat et convenu, avec de bons acteurs et une bonne dose d’humour, mais pas
grand-chose de plus. Le film n’avait rien d’exceptionnel, mais il l’avait touché au plus profond de son être. Le personnage principal, Ryan Bingham, était son alter ego masculin. Et l’image qu’il
lui avait renvoyée d’elle-même ne lui plaisait pas. Cela l’inquiétait même.
Elle tourna la clé dans la serrure, poussa la porte, alluma la lumière et s’affala dans son canapé. « Pour une soirée divertissement, c’est raté », dit-elle tout haut. Elle rit. Et oui, elle
parlait toute seule régulièrement, comme une petite vieille. À croire que la solitude ne lui réussissait pas. Et pourtant, elle l’aimait cette solitude… elle la chérissait même. Elle regarda son
appartement, un minuscule studio au cœur de Paris, un petit pied à terre avant de reprendre la route. Pas de déco aux murs, pas de photographies d’amis ou de famille, pas grand-chose dans le
frigo et très peu de vêtements dans l’armoire. Les seuls objets qu’elle conservait précieusement étaient ses cartons de livres, ses carnets où elle consignait le récit de ses aventures, les
bibelots-souvenirs de ses nombreux voyages et son sac à dos.
C’était un vieux sac à dos tout défraîchi, recousu en maints endroits et décorés de drapeaux et d’écussons. Une vraie relique, le témoin de sa vie passée et future. Le seul témoin d’ailleurs. En
y réfléchissant, ces quelques objets, les milliers de photos sur son ordinateur et les souvenirs qu’elles avaient en tête, étaient tout ce qu’elle possédait, tout ce qu’elle avait au monde. Après
tout, elle n’avait personne de proche. Elle n’avait plus vu ses parents depuis quatre ou cinq ans et sa sœur… cela faisait si longtemps qu’elle ne s’en rappelait même plus. Elle leur envoyait
parfois des mails ou des cartes postales pour leur dire qu’elle était vivante et c’est tout. Côté amis c’était encore plus le désert, elles les avaient perdus de vue depuis longtemps. Côté cœur,
n’en parlons-pas ! Son dernier vrai petit-ami l’avait quitté il y a dix ans, car il en avait marre de vadrouiller, car il voulait se poser. Voilà, à 36 ans, elle n’avait personne sur qui compter.
Et personne ne comptait sur elle non plus d’ailleurs. Oh, bien sûr elle connaissait beaucoup de personnes. Dans le monde entier même. Il n’y avait qu’à voir le nombre d’ « amis » qu’elle avait
sur Facebook. 1346. Et c’était sans compter ceux qui n’avaient pas de compte Facebook ou même Internet. Mais qu’est-ce que ça voulait dire un « ami Facebook ». Un petit coucou tous les ans, un
bon anniversaire par-ci, une bonne année par-là, quelques photos à partager… Rien de plus. Et pourtant tous ces gens, elles les avaient rencontré, elle avait partagé des moments intenses avec
eux, elle était si vivante auprès d’eux. Elle avait fait un trek en Chine avec Tim et Merryl, un couple américain sympa. Elle s’était baignée dans un lac gelé suédois avec Anna et Mareike, les
rigolotes allemandes. Elle avait fêté ses 25 ans en Antarctique avec une bande de japonais et avait dansé la salsa tous les soirs avec Estefania et Angela pendant un mois. Et puis elle leur avait
dit au revoir, avait repris son sac à dos et était partie vers d’autres horizons, en espérant les revoir un jour. Sauf qu’elle ne les revoyait jamais…
Elle se servit une tasse de thé bouillant et ouvrit une tablette de chocolat pour se réconforter. Mais pourtant elle n’était pas malheureuse et elle n’avait pas besoin d’être réconfortée. Elle
aimait sa vie, sans attache, sans plan précis, sans destination tracée d’avance. Elle avait fait trois fois le tour du monde, avait travaillé dans un orphelinat au Viêtnam, été serveuse à Sydney,
fermière au Chili et tant d’autres choses. Chaque expérience était unique et inoubliable. Chaque expérience la poussait à aller toujours plus loin, à découvrir d’autres horizons. Et elle se
faisait toujours un plaisir de raconter ses aventures chez les gens chez qui elle atterrissait, à Tokyo, Rio ou Nairobi. Elle avait la passion de la lecture et de l’écriture, s’essayait à la
photo, dessinait, était une sportive accomplie et parlait couramment six langues. Avait-elle besoin de plus ? Avait-elle besoin de la vie rangée que tous semblaient si ardemment désirer ? Un
boulot tranquille, cinq semaines de congés payés par an, une grosse voiture, trois gosses et un chien ? Non, certainement pas…
Oui, le personnage de Ryan Bingham (alias George Clooney) semblait regretter la vie rangée qu’il avait manqué et les attaches dont il s’était libéré. La fin du film était claire. Mais elle, elle
n’était pas un personnage en mal de liens humains, elle n’était pas dans le film de Jason Reitman. Elle était fière et heureuse de sa vie, elle n’était vivante que sur la route, sac au dos, plan
en mains et bob bien vissé sur la tête.
« Allons donner une fin plus fun et moins convenue à ce stupide film », dit-elle en souriant. Elle remplit rapidement son sac à dos, choisit un ou deux livres pour la route, laissa les
instructions de base à sa voisine qui avait l’habitude de la voir partir. « Déjà sur le départ, Mlle Maisonneuve ? » lui demanda-t-elle. « Oh, oui vous savez, deux mois, je commençais à m’ennuyer
ferme. A bientôt. » dit-elle en faisant la bise à sa voisine. Tout en sachant pertinemment que le « bientôt » serait sans doute dans six mois ou un an… voire plus.
Arrivée à Roissy, elle se dirigea vers le tableau des départs. « Déjà fait… ennuyeux à mourir… quand j’aurai 60 ans… non… déjà fait… déjà fait… non… et… yes !… ». Elle avait trouvé. Elle se
dirigea vers le comptoir et demanda un billet pour Johannesburg. Pour le reste, elle verrait plus tard sur place. Une fois passé tous les contrôles, elle erra dans la zone duty-free, puis s’assit
sur un siège, un grand sourire aux lèvres.
Si Ryan Bingham n’avait pas su savourer la chance de vivre « in the air », elle, elle saurait la saisir et apprécier sa vie sur la route…
Evertkhorus
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Félicitation pour ton texte que j’ai beaucoup apprécié !
Je vote pour Evertkhorus!!
Ca mériterait une suite (^_^)
Un par jour si je sais lire donc je peux revoter aujourd’hui ? :)
A 00h30 ? chez moi c’est écrit 23h47 lol
Ben sinon je voterais demain, aucun soucis ;)
Oups, mais c’est pas grâve ;)
Je vais faire ma chieuseux !!!!!…….
mais chaque jour tu devrais changer les notes de place ! ceux qui se retrouvent en dernière place ont moins de chance d’être lu !!!!!!!
Smiley qui dlifflotent !!!!!!!
Je me doute que c’est pas évident de gérer ! c’est pourquoi je me suis traitée toute seule de chieuse ! ;)
c’est déjà énorme ce que tu fais herisson
c’est super bien ma poulette !! je rêverais de faire des petites nouvelles comme ca mais j’y arrive pas. c’est toujours 10 fois trop long. ca me donne envie d’essayer. d’ailleurs ca me trotte dans la tete depuis quelques temps. olala, je suis bien loin de ton niveau !! gros bisous !!
Comme je te l’ai déjà dit, j’ai trouvé ton histoire très sympa et très bien écrite, bravo
Je craignais la chute, mais elle est totalement selon ma vision du monde. (bien que je n’ai pas vu le film en question).
Et donc si j’ai bien compris, ce commentaire vaut un vote !
Bah voilà on est le 9 Avril et je vote pour Evert ! J’ai bien aimé son texte même si elle dit qu’elle l’a écrit dans l’urgence .
Il est vrai qu’une suite serait souhaitable : alors c’est pour quand :P
Chouette, chouette, chouette ! j’attends le livre dont ce texte est extrait, lol ! bisous
Je (re)vote pour aujourd’hui (^_^)
Je suis un peu longue a la detente ! Bravo pour ton texte Evertkhorus ! Je vote egalement pour toi !
j’ai hâte de lire la suite…
Waow vraiment bien cette petite nouvelle (même si je suis totalement partial…), j’espère qu’il y aura une suite!
Ben je crois que t’as raison Cacahuète, mais avec la récap à la une, oui! Enfin pas évident pour la miss Herisson non plus à gérer!
Oh merci Azariel, contente que ça t’ait plu! Pas convaincue pour ma part, mais je me suis bien amusée en l’écrivant, c’est l’essentiel!
Oui c’est déjà super tout ce que tu mets en place et bien sûr avec les articles que tu vas écrire ça va être vite caché… bon week-end en tout cas!
Vi je crois que tu peux:)
Merki les filles. Oula une suite… va falloir trouver de l’inspiration!
Ah mais il sont tous apparus avant minuit Herisson08, je les ai vus avant de me coucher et je vois aussi Azariel qui a commenté à 23h46… étrange, ton blog fait des bugs!:)
Bien contente que ça t’ait plu ma petite Sarah! Tu n’as qu’à essayer, tu verras bien ce que ça donne et je suis sûre qu’avec de la pratique ça le fera! Si tu t’y mets, n’hésite pa sà me faire lire!
Hehe Remerci Tal!
Merci beaucoup Tiphanya, pareil cette chute me correspond beaucoup plus!
Merci Anne-Claire, c’est gentil d’avoir voté!
Oh merci la miss Leyla, c’est gentil! La suie… euh… Je ne fais jamais de suite à mes nouvelles, mais j’ai bien envie de continuer à écrire sur ce thème qui me tiens à coeur!
Hahaha j’adore ton pseudo Chris ;)
Merci pour le vote, c’est sûr que y’a pas plus partial que toi! Tu me diras ce que tu en pense vraiment, hein?!
Merci Aurelia d’être passée par là… Liyah c’est toi qui te cache derrière ce nom?