L’ Evade de Belle-île

evadeA partir de 12 ans

L’ évadé de Belle-île

Histoire d’un bagne pour enfants

Philippe Nessmann et Piero Macola

Les éditions des Éléphants (2025)

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Décembre 1934. Un jeune garçon de 14 ans écrit à un journaliste pour lui raconter son expérience au bagne pour enfants de Belle-île. Resté seul à la mort de sa mère, son père étant déjà décédé, il se retrouve à vivre dans la rue. Il se fait attraper en essayant de voler une paire de chaussures. Devant le juge, il avoue et dit qu’il sait que c’est mal de voler, mais qu’il n’a pas le choix pour survivre. Pour lui apprendre un métier, le juge l’envoie à la maison d’éducation surveillée de Belle-île-en-mer.

Après un voyage en train de Rennes à Quiberon, puis en bateau et enfin à pieds, il arrive au bagne.

Puis, tout est allé très vite : à l’infirmerie, j’ai du me déshabiller, me laver à l’eau froide, enfiler un uniforme beige et me faire tondre les cheveux. Ensuite, direction le bureau du directeur. Il a pris un grand cahier et m’a dit que je serais le numéro 22667. Il m’a aussi dit qu’il savait pas combien de temps je resterais là : deux ou trois ans si j’étais sage, jusqu’à mes vingt et un ans sinon.

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Sur cette histoire d’enfant qui s’ evade, vous avez certainement entendu parler de L’enragé de Sorj Chalandon, paru chez Grasset en 2023. Ou peut-être connaissez-vous le poème de Jacques Prévert ?

Moi, ce qui m’a le plus effarée quand j’ai entendu parler de cette histoire, c’est la date de fermeture de ce bagne ! 1977 ??? Non seulement j’étais née, mais j’avais déjà 10 ans… Presque l’âge de certains enfants enfermés dans ce bagne (le plus jeune avait 12 ans). Et j’avoue que je n’avais jamais entendu parler de ça avant la sortie du roman de Chalandon.

Cet album est écrit à la première personne du singulier et il y a beaucoup de dialogues, ce qui rend la lecture facile, même si les enfants ne sont pas “gros” lecteurs. Et puis c’est un album, donc il y a des illustrations à toutes les pages. A la fin, 3 pages purement documentaires (avec photo d’époque) permettent d’en savoir plus sur le sujet.

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Image prise sur le site de l’éditeur

De Philippe Nessmann, Mélissande a présenté le très bel album : Te souviens-tu Marianne ?

Sur son site, il explique pourquoi il écrit. Et un peu plus bas, il y a un dossier très complet avec des photos sur le bagne de Belle-île.

De l’illustrateur, Piero Macola, je vous avais présenté une très belle (et triste !!) BD : Le tirailleur

Instagram de l’illustrateur

Les archives départementales du Morbihan ont également fait un article sur le sujet.

Champs de bataille – L’histoire enfouie du remembrement

BatailleChamps de bataille

L’histoire enfouie du remembrement

Inès Léraud

Pierre Van Hove (ill.)

Mathilda (coloriste)

La Revue Dessinée
Delcourt (2024)
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Éditeur : À la sortie de la Seconde Guerre mondiale, l’État fait redessiner les terres agricoles dans la plupart des campagnes françaises. Accessibilité des champs par des machines, regroupement des parcelles et disparition des haies et talus. C’est le “remembrement”. L’objectif est que la paysannerie produise davantage, que le pays atteigne son auto-suffisance alimentaire et que la France devienne une puissance agricole mondiale.

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Naïvement, je pensais que c’était les paysans qui avaient décidé, au fil du temps, d’agrandir leurs parcelles. En lisant cette bande dessinée, je me suis rendue compte que c’était loin d’être le cas. Non seulement on ne leur a pas demandé leur avis, mais on a, pour certains en tous cas, totalement détruit leur vie !!

Ils étaient autonomes et indépendants. Ils produisaient suffisamment pour subvenir à leurs besoins, que ce soit avec les légumes, les animaux ou les vergers. Suite au remembrement, on les a rendu totalement dépendants… Dépendants pour l’achat des semences, des tracteurs, des pesticides… Et dépendants de la Politique Agricole Commune.

Je n’imaginais pas à quel point cette histoire avait été violente !! On a arraché des tas de haies, d’arbres (y compris des arbres fruitiers qui produisaient) On a totalement transformé le paysage et la vie des gens. Champs de bataille, le titre est bien trouvé…

Il y avait une “bonne” raison : c’était à la fin de la seconde guerre mondiale, il fallait que les paysans soient capables de “nourrir la France”. Mais la façon dont ça a été fait … C’est hallucinant et totalement ignoble.

Comme dans la bd “Algues vertes“, les illustrations sont simples et aident à faire passer le propos.

Je vous invite vraiment à lire cette enquête, c’est à la fois édifiant et terrifiant…
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Lire les premières pages (site de l’éditeur)

Après “Algues vertes“, c’est encore une fois une bd très intéressante et bien documentée que nous propose Inès Léraud.

Avec d’autres journalistes, elle a fondé le média d’investigation “Splann !” (en français et en breton)

Interview d’Inès Léraud sur les cicatrices mémorielles liées au remembrement.

Cette semaine nous sommes chez Moka, Au milieu des livres

L’incroyable histoire du coq qui ne voulait pas…

CoqRoman à partir de 9 ans

L’INCROYABLE HISTOIRE DU COQ QUI NE VOULAIT PAS FERMER SON BEC

Thomas Gerbeaux & Pauline Kerleroux

Collection Hibouk

La joie de lire (2021)

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Aujourd’hui c’est mercredi. Normalement, Jeanne reste à la maison avec son père ce jour là, sauf qu’aujourd’hui… il ne peut pas s’occuper d’elle, il doit partir.

Du coup, il la confie à la secrétaire de rédaction du journal dans lequel il travaille. Ancien vétérinaire, il écrit une chronique qui parle d’animaux et qui s’intitule “Pas si bête”.

Dans la salle de rédaction, Jeanne va faire la connaissance de Marguerite Duras, une journaliste que tout le monde appelle Margot.

Celle-ci est en train d’enquêter sur une étrange affaire et son article commence ainsi : “Le coq de l’île aux moutons est-il forcément coupable ?

Jeanne est originaire de cette île. Elle est donc très intéressée par cette enquête…

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Toute cette histoire est partie d’un fait divers réel : En 2019, le coq Maurice de l’île d’Oléron a été autorisé à chanter au terme d’un procès très médiatique devant le Tribunal correctionnel de Rochefort (Lire l’article du Monde). Je me souviens que j’avais été assez agacée en entendant parler de ça…

Quand on habite en ville, il y a le bruit des voitures, des avions, des gens, du métro… Et à la campagne, il y a du bruit aussi. Les animaux, les tondeuses, les gens, les voitures. Qui peut échapper au bruit aujourd’hui ? A moins d’habiter dans un endroit très isolé, et encore, il y aura toujours un chien pour aboyer ou un avion qui passe dans le ciel. Si on commence à faire des procès à tout ce qui fait du bruit, on n’a pas fini !! Bref, fin de la parenthèse.

Pour en revenir à ce roman, il est plutôt rigolo. Le narrateur est une fille de 11/12 ans, Jeanne et c’est elle qui va mener l’enquête.

Deux choses ne m’ont pas plu, mais ça n’a rien à voir avec l’histoire. Et ça ne dérangera probablement pas la plupart des enfants à qui est destiné ce roman (et c’est bien le principal !). Ce qui m’a déplu, ce sont les couleurs ! Elles sont super “flashy“, on dirait que c’est coloré au surligneur… Et puis le texte écrit en bleu assez clair sur du blanc, j’avoue que ça m’a un peu gêné aussi.

Mais sinon, les dessins sont amusants, très simples, stylisés. Et une partie du sujet est importante, c’est “faut-il croire tout ce qu’on voit sur les réseaux sociaux ?

Bref, une lecture intéressante et très chouette malgré ces couleurs qui m’ont “piqué” les yeux !! ;)

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Pour lire quelques pages (et voir quelques illustrations) c’est sur le site de l’éditeur

L’avis de Pépita

ALGUES VERTES – L’histoire interdite

AlguesBD Documentaire
Enquête journalistique

ALGUES VERTES

L’HISTOIRE INTERDITE

Inès Léraud

Pierre Van Hove (ill.)

La Revue Dessinée

Delcourt (2019)

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Présentation de l’éditeur

Pas moins de 3 hommes et 40 animaux ont été retrouvés morts sur les plages bretonnes. L’identité du tueur est un secret de polichinelle : les algues vertes. Un demi-siècle de fabrique du silence raconté dans une enquête fleuve.

Des échantillons qui disparaissent dans les laboratoires, des corps enterrés avant d’être autopsiés, des jeux d’influence, des pressions et un silence de plomb. L’intrigue a pour décor le littoral breton et elle se joue depuis des dizaines d’années. Inès Léraud et Pierre Van Hove proposent une enquête sans précédent, faisant intervenir lanceurs d’alerte, scientifiques, agriculteurs et politiques.

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Voilà plusieurs fois que je vois passer cette BD. Je l’avais même empruntée à la bibliothèque, puis rendue sans l’avoir lue. Il faut dire que je trouve la couverture vraiment affreuse ! Je ne m’étendrai pas sur les couleurs. Quand au dessin, il est simple et permet d’alléger le propos, mais ce n’est pas pour lui que j’ai lu cette bd.

C’est une bd documentaire pure et dure. Une enquête mise en images. Je pense que je n’aurai peut-être pas lu un ouvrage sur les algues vertes (avec des dates, des chiffres, beaucoup de noms…) mais il faut bien avouer qu’avec le format bd, ça passe tout seul !

Et c’est édifiant…

Je me fait souvent traiter de “Bisounours” pour ma grande naïveté, mais là, je suis vraiment tombée de ma chaise ! On connait le problème (et les dangers !) des algues vertes depuis plus de 50 ans, mais il y a une espèce d’omerta, de loi du silence imposé par des lobbys qui fait… qu’on ne fait rien !

Si. On montre du doigt les agriculteurs (les “pollueurs”) qui sont en fait également victimes du système mis en place après guerre (le remembrement). Et c’est tout…

Il faudra sans doute un peu plus de morts pour qu’enfin “on” fasse quelque chose.

Bref, lisez cette enquête très instructive, offrez-là, prêtez-là, faites la connaître ! Il faut que cesse ce scandale !

La Bretagne est une terre magnifique, protégeons-là !

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Lire les premières pages sur le site de l’éditeur

Cette bande dessinée a reçu Le prix de la BD Bretonne Penn Ar BD

Ci-dessous, une présentation vidéo :

D’autres que moi l’ont lue et appréciée : Gambadou, Caro, Alice

Cette semaine, nous sommes dans la bibliothèque de Noukette