Say something – Roman ado/jeune adulte

saySay Something

Jennifer Brown
Albin Michel (2018)

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Au lycée, avec son nom de famille “féminin” -Judy- sa timidité et son allure chétive, David est la proie rêvée de certains plus costauds, plus sportifs, sûrs d’eux et de leur force et inconscients, sans doute, des ravages qu’ils occasionnent.

Cette année, plus encore que les autres années, David fait sa rentrée (en Terminale) la peur au ventre. Il faut dire que l’année précédente a été terrible, un déferlement de violence ayant eu lieu dans son lycée. David a passé l’été enfermé chez lui à essayer d’oublier. Impossible, d’autant qu’il “sait” des choses, des choses qu’il devrait dire à la police, mais il ne peut pas, il n’y arrive pas. Les mots refusent de franchir ses lèvres et, du coup, il culpabilise…

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En lisant ce roman, on a l’impression de vivre de l’intérieur, de ressentir, de comprendre ce que c’est que d’être quotidiennement moqué / insulté / harcelé par d’autres élèves au lycée. Ce sont toujours les mêmes insultes “Pédé. Tapette. Pédale. Tantouze.” Les mêmes vexations (baisse du pantalon, obligation de faire des pompes devant tout le monde). Pourtant, le ton n’est pas “pleurnichard”, David, s’il souffre de tout cela, ne s’en plaint pas. Il s’adapte (il ne mange plus le midi pour éviter qu’on crache dans son assiette par exemple), évite, courbe l’échine.

Étrangement, ce ne sont pas toutes ces persécutions qui le perturbe le plus, mais bien cette chose qu’il sait et qu’il n’arrive pas à dire. Le poids de la culpabilité.

Say something est un roman très court puisqu’il ne fait que 126 pages (les 24 dernières pages sont le début du roman précédent de l’autrice), mais il laisse un goût un peu amer. (c’est ça l’endroit où l’on envoie nos enfants s’instruire ?? Sans être trop naïf, ça fait quand même un peu peur.)

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Ce livre est un “complément” à Hate list (plus qu’une suite, c’est un autre point de vue). Je l’ai lu sans avoir lu “Hate list” et j’ai très bien compris l’histoire.

Lire quelques pages sur le site de l’éditeur

De cette autrice, Sophie vous a déjà présenté “Tornade

P’tit bout – Roman ado/adulte

boutP’tit bout ♥

Alex Wheatle

Au Diable Vauvert (2017)
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P’tit bout, c’est Lemar. Comme il était le plus petit de sa classe en début de collège, on l’a appelé “P’tit bout“. Il a un peu grandi, ce n’est plus lui le plus petit, mais le nom est resté.
Avec ses potes McKay et Jonah, ils essaient de dégoter un rencard avec une fille. P’tit bout est en admiration devant Venetia King, la fille la plus sexy du collège. Alors quand celle-ci, admirative de son talent de dessinateur, vient lui demander de lui faire son portrait, il est aux anges !

Mais tout ne va pas se passer comme prévu, d’autant plus que P’tit bout est recruté – un peu (beaucoup !) malgré lui – par un des plus gros chefs de gang du quartier…

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Ce qui m’a vraiment beaucoup plu dans ce roman, c’est que j’y ai cru. A fond. Par moments j’ai eu peur pour P’tit bout, j’ai été triste ou heureuse pour lui à d’autres moments. Dans ma tête, je lui donnais des “conseils” (fais pas le con P’tit bout, tu déconnes P’tit bout, fais pas ça !) Bref, j’étais totalement immergée dans l’histoire, que j’ai lu d’une traite. P’tit bout et ses copains sont des personnages très attachants.

Et en plus, j’ai ri. Malgré une histoire pas toujours très gaie (problèmes familiaux, chômage, précarité, pauvreté, violence -on est dans une “cité” contrôlée par des gangs-) j’ai beaucoup ri en “écoutant” P’tit bout et ses amis. L’écriture est dynamique et très drôle.

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Un extrait :

“- Pour avoir une fille comme Venetia, il faut tous les trucs qui vont avec, mon frère, m’a expliqué McKay. Tu dois avoir un Iphone, des écouteurs Dr. Dre, les dernières Adidas, une belle coupe de cheveux à l’iroquoise et être assez grand pour qu’elle puisse poser sa tête sous ton menton. Les filles canon aiment bien qu’on leur fasse penser à un grand frère.

– Ouais et toi, Bout, t’as rien de tout ça, a ajouté Jonah. Alors laisse tomber et pense même pas à aller parler à une petite merveille comme Venetia.

J’ai commencé à m’éloigner, sachant bien que, même si j’avais des écouteurs Dr. Dre et tout le reste, je n’aurais jamais le cran de parler à Venetia. Jonah et McKay m’ont rattrapé et on s’est tirés du bahut.

On habitait touts dans la cité de Crongton-Sud, à dix minutes à pied du collège. Jonah vivait au 2ème étage de mon immeuble et moi au 5ème. McKay Tambo habitait avec son père et son frère ainé dans le bloc de béton d’en face. Dieu seul sait ce qu’ils devaient engloutir dans leur case, parce qu’ils avaient tous les trois la carrure des catcheurs.”

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Prix du meilleur roman jeunesse du Guardian en 2016

Sur le site de l’éditeur Au Diable Vauvert, j’ai appris qu’il s’agissait du 1er tome d’une trilogie dont le 3ème tome doit paraître en 2019… A suivre !

Tu vois, on pense à toi ! de Cathy Ytak

Tu vois, on pense à toi est un court roman épistolaire qui permet de partir sur les traces de deux copains en classe découverte sur une île.

tu vois, on pense à toiTu vois, on pense à toi

de Cathy Ytak

Syros, 2017
Tempo, 67 pages
9782748523126, 6,35 euros

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Amitié, île, correspondance, épistolaire, mail, mer, voyage scolaire

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Clément et Nolan partent en classe découverte sur l’île Scobier, laissant derrière eux leur amie Alwena, coincée à l’hopital. Ils décident alors de lui envoyer des mails pour lui faire vivre aussi leurs aventures… Alwena quant à elle est friande de ces nouvelles, et de savoir s’ils ont accomplis la mission demandée.

On oscille avec Tu vois, on pense à toi ! entre trois histoires, trois genres presque, et tout ça seulement en une soixantaine de pages.

Nous avons l’échange épistolaire d’une part, et uniquement cela, même si quand les garçons racontent leur journée, des dialogues sont présents. Ainsi pas de narrateur externe pour nous donner des informations sur les personnages ou la véracité de l’histoire, on est obligé de suivre le mouvement, de tourner les pages pour en savoir plus.

C’est Nolan qui y a pensé le premier, à t’écrire. Tu le connais : les bonnes idées, c’est toujours lui qui les a. Après, il faut qu’il trouve quelqu’un pour les mettre en pratique… Et là, c’est moi.

L’aventure, voire l’enquête menée par Clément et Nolan, est aussi un élément important de l’histoire, celui qui tient en haleine Alwena, qui lui permet d’être un peu avec eux sur l’île. Une histoire à la limite du merveilleux, qui étonne, questionne.

Enfin, il y a l’amitié, le secret d’Alwena, la boite bien lourde que Clément et Nolan transportent. Ce mystère ajoute encore une autre dimension au roman, le rendant doux et touchant. Une vraie ôde à l’amitié avec des mots très justes, des émotions simples, et des enfants touchants.

Un roman court mais très riche, avec les doux mots de Cathy Ytak et une imagination débordante d’enfants. Un texte court, facile à lire, mais très positif et intéressant dès 9 ans.


+ le site de Cathy Ytak

+ D’autres livres de Cathy Ytak à découvrir sur Délivrer des Livres :

LaSeuleFaçonDeTeParlerMains

Le masque de la mort rouge (classique – Poe)

 

masque

Le masque de la mort rouge

et autres histoires extraordinaires

Edgar Allan Poe

Traduction de Charles Baudelaire

Éditions Milan (2000)

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Indiqué “à partir de 9 ans”, je trouve que c’est un peu exagéré ! C’est violent, morbide et très descriptif, et je ne pense pas qu’un enfant de cet âge-là y comprenne quelque chose…

Écoutez ou lisez la première nouvelle et revenez me dire si vous liriez ça à votre enfant de 9 ans ! ;)

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masque

6 nouvelles composent ce recueil paru initialement en 1842. Il s’agit de :

  1. Le masque de la mort rouge : Texte original ici.
  2. Le chat noir : Texte ici
  3. La chute de la Maison Usher : Le texte ici
  4. Le cœur révélateur : Texte
  5. Hop-Frog : Voici le texte
  6. La barrique d’amontillado : Texte en lien

Je n’ai volontairement pas mis les résumés de ces nouvelles. Tout l’intérêt de ces nouvelles, pour moi, réside, non pas dans l’histoire, mais dans la façon dont elle est racontée et mise en scène. Je me souvenais avoir lu ces nouvelles vers l’âge de 13 ou 14 ans. Une première approche de “l’horreur” parce qu’il faut bien avouer que c’est plus que du fantastique, c’est du fantastique qui fait peur et met mal à l’aise !!

Voilà en quoi, pour moi, Poe est un grand écrivain. Malgré le temps passé depuis l’écriture de ces nouvelles, le temps écoulé depuis ma première lecture, j’ai ressenti le même malaise. Ces descriptions, si imagées et si complètes, m’ont totalement “possédées” !!

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Si vous voulez écouter “Le masque de la mort rouge” c’est par là (beaucoup d’autres sont également disponibles en audio) :

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C’est bien de (re)lire des classiques, on fait quelques recherches pour se documenter et puis on s’aperçoit qu’un auteur dont on était intimement persuadé qu’il était anglais est en fait… américain ! Humm… Passons…

Participe au Challenge “Cette année, je (re)lis des classiques” et “Challenge des RE” chez Blandine

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